Le silence, se taire
Plus d'une semaine que tu n'as rien posté.
Le silence.
Se taire.
Ce n'est pas pareil !
Il n'y a pas de silence.
La rue est plus que jamais bruyante, trop de travaux.
J'ai dit trop fort qu'on était abandonné. Alors ils refont le square pour la millième fois.
Du coup tu n'entends plus les cris d'enfants. Juste le bulldozer. Mais le square, quand il ouvrira, il leur reste quoi aux gosses, l'essentiel est pour les SDF...
Cette nuit ils se sont invités sur mon palier. Des bouteilles vides, des papiers, et d'autres traces...Ils ont du ronflés comme moi, je ne les ai pas entendus !
Depuis trop de jours les cris me réveillent. Souvent dans la rue. Là, c'est derrière la cloison.
A cinq heures, à six heures, tout flambe,
les gosses pleurent les femmes geignent et l'homme crie. Quel cri ! Qu'est ce qui lui colle à la peau qui l'entraine dans ces colères désespérées ? Qu'est ce qui l'entrave et l'empêche
d'être ? Sait-il ce qu'il veut ou même souhaite ?
Combien d'habitants dans le quartier ? Le double ! Comprends pas ? Il ya ceux qui comptent, et ceux qu'on ne compte pas. On est le double.
Se taire, c'est quand on ne peut plus rien dire, quand tout ce qu'on ressent n'a plus de mots. J'ai de la chance, j'ai pu voyager. Ça n'empêche que je sache d'où je viens. Mais là, comment te dire que je suis heureux de mes ballades ? Je rêve, mais le matin en longeant la rue, je vois les sans rêves, sans espoirs, j'ai plus de mots.
Clairement le pire est devant nous. Alors je me tais.
C'est vrai aussi, que je n'ai pas été à la hauteur de mes sensations, dans mes carnets de voyage au cours de la visite de ces missions jésuites en Argentine et au Paraguay. Il y avait là un rêve fou, des êtres libres et égaux, ce qui n'empêchaient ni l'organisation sociale, le choix d'un leader et quelques contraintes obligataires à un état représenté par les jésuites. C'est cette intermédiation entre un état despotique, des colons avides, et la protection des valeurs culturelles, sociales, économiques et religieuses qui avait rendu possible 150 ans de progrès. Quand il ne reste plus que l'accaparation par les puissants de l'effort de tous et jusqu'y compris dans les moyens de l'état, il ne reste que ruine et misère. Nous y sommes.
Jésus de Tavarangue - La Santisina de Trinidad - Cosme Damien - Missions jésuites du Paraguay
L'autre soir, tu regardes la télé, tu vois les joueurs d'Uruguay. Et tu repenses à la naissance de cet état dans l'histoire moderne, il est un enjeu de cette guerre, allié au Brésil avec l'Argentine contre le Paraguay, en relation à l'essor économique de ce dernier, développé par l'assimilation des guaranis chassés des missions par les colons Argentins et Brésiliens. Il est financé par l'impérialisme colonial anglais.
Donc, ce quatre mars 2008, tu franchis, pas trop loin de Posadas, la frontière du Paraguay, pour y visiter ces trois missions jésuites. Ce matin il est à peine sept heures quand nous arrivons au poste frontière. Le passage des frontières reste une loterie, nous prévient Huguette, partons de bonne heure ! Elle collecte les passeports, fait des copies des autorisations du bus et en quelques minutes, nous sommes au Paraguay, en face de Incarnation. La frontière est sur le fleuve Paranã, plus de 4000Km. Un immense pont à traverser. La route que nous suivons nous fait traverser des villages très semblables à ceux que nous venions de quitter.
Jésus de Tavarangue : Quelques photos et une vidéo sous la pluie, dans la brume matinale. Je te parlerais de Trinidad une autre fois.
J'avais préparé ce sujet il y a plus d'une semaine, sans trouver le temps de le mettre en forme et le publier. Pourtant il me tenait à cœur.