Il y a deux semaines tu affrontais la chaleur pour cette ballade du pont de Crimée au parc des Bergères, le long du canal de l'Ourcq.
Pas un exploit pour n'importe qui, mais pour toi, une sacrée mise à l'épreuve. Tu avais aperçu les affiches de ces visages, collées sur les murs. Elles t'ont touché tout de suite. Donc, tu repasses, le caméscope sur le ventre et ta gourde dans le sac à dos.
Lorsque tu photographiais, il y a bientôt sept ans, le début des travaux de réhabilitation des grands moulins de Pantin, ou plus récemment, la construction de la passerelle du Tram T3, tu n'imaginais pas la « gueule » du coin dans un fort soleil d'été. Parce que les briques ocres des Grands Moulins et le vert miroitant des eaux du canal font un festival pour tes yeux. Bien sûr, le dimanche, il n'y a pas l'agitation des employés et le bruit des puissants moteurs de la grue sur le ponton. Le béton se gave de sable et le casque phonique est obligatoire. Que d'espace pris sur les petits terrains de foot du quartier par les bétonneurs.
C'est là, sous la passerelle du T3 que les murs encollés de photos noir et blanc te font signe. Pas un visage qui ne t'appelle, que tu ne reconnaisse. Ta famille est là, tu mets des noms bien plus facilement que sur les vieilles pierres d'un cimetière. Sérieux, interrogateurs, ou te provoquant par leur clownerie, ils te disent mieux que tout : regarde nous, regarde autour de toi, nous sommes tous pareils. Éclaire ton visage, ouvre tes yeux, barbe dure ou regard tendre, sourit, accueille le premier que tu croises, et simplement par ta lumière, ta présence exprime lui que tu le reconnais.