Le village entre soleil et pluie? Tu préfères le soleil !
Une semaine que t’es rentré. Bouffé par des contraintes administratives et d’autres rendez-vous. Le blog s’en ressent. T’avais même ramené le petit journal du canton. Pas eu le
temps de bien le lire. T’as juste pointé cette histoire abracadabrantesque de vouloir faire des fouilles autour des lacs. Entre la vase et les rejets de la station d’épuration t’imagines les
fossiles qu’ils vont trouver. Dans un village ou tout ce qui vit est en sursit d’être écharpé par un camion pressé ou un engin bien large, il vaut mieux gaspiller la tune collectée par les impôts
à déterrer les os vieux de 2000 ans, que de rendre le village pratique aux vivants.
Pourtant ce petit village est agréable, dès que tu VTTistes ou que tu marches, le paysage se renouvelle toujours : montagnes au loin parfois visibles, végétation qui se colorie avec le soleil ou s’assombrit avec la pluie.
C’était les vacances scolaires. T’avais pas choisi vraiment, juste profiter d’un trou dans l’agenda pour faire
un petit saut. T’es surpris par le peu d’enfants que tu vois. C’est vrai qu’il n’y a pas d’espace pour des activités sportives. Pas de terrain de foot, ni de rugby. Les tennis de Château
Bijou n’ont été utilisés que par quelques rares résidents, ils sont à l’abandon. Seul le fronton tient un peu. Trois quatre gosses quand l’aire de jeu n’est pas transformée en parking, tapent
quelques balles jusqu’à ce qu’une frappe manquée fasse disparaître la pelote dans les hautes herbes qui descendent au lac ou entre les planches pourries de la vieille bascule. De longues minutes
de fouille, et l’abandon de lassitude. Pas vraiment d’espace pour les mômes.
Quand tu fais le tour du lac, des hommes sont là, descendus de voiture, parfois le moteur tourne, ils te regardent sans vraiment te voir. Tu dis « bonjour », la conversation s’arrête, l’un rappelle le chien qui se jetait vers toi, le regard se détourne. Tu renouvelles le « bonjour ». Tu entends « on y va », et les voitures repartent… Ce tour, tu le fais dix fois par an, pas nombreux ceux qui disent bonjour…
L’hiver le village est triste. Les maisons inhabitées aux volets fermées transforment les rues en corridors offerts à la boulimie de bitume des camions desservant les carrières. Le fracas des bennes projetées par les chaos de la rue défoncée sonne l’alerte ! L’homme solitaire doit prendre mille précautions pour aller cherche son pain ; surtout s’il marche difficilement ou n’entend pas bien !
Nul doute que de fouiller la vase des lacs redonnera vie en envie au lieu. On y retrouvera peut-être un vieux pavement gallo-romain pour refaire les trottoirs, ou l’enregistrement d’une conversation d’il y a quelques siècles quand les hommes se disaient « bonjour »…