Tanis Ismaïlia Suez.
Egypte 28.
En redécouvrant les images et les vidéos du voyage, je me retrouve comme ça, dans une étrange fébrilité émotionnelle. Pourquoi ai-je décidé de visiter l'Egypte, pourquoi ai-je voulu ajouter la visite du Delta du Nil puis du Sinaï ? Bientôt cinq ans que nous avons fait ce voyage, et nous avons regardé les images à toute vitesse à notre retour. Des pas trop moches que je mets sur ce blog, et d'autre qui me renvoient uniquement à l'émotion de la visite, mais sans vraie qualité.
Les pyramides, c'était un lieu mythique. Bonaparte, « quarante siècles ... ». Suez, c'est une légende moderne. D'abord la percée de ce canal sous l'autorité de Ferdinand de Lesseps, puis la guerre de 1956 contre sa nationalisation par Nasser. Nous venions de quitter Assouan et ce barrage pharamineux. Et nous sommes en route vers le Sinaï. Et la « Guerre des Six jours de 1967 » qui me revient (les anciens militaires dans la société où je travaillais arrosait au champagne les progressions de l'armée israélienne). Peut-on traverser ce pays avec un regard occidental, ignorant les ressentiments des conquêtes, du colonialisme, de la guerre qui n'en finira jamais ? Bien sur qu'on le voudrait !
Mais il ne te suffit pas de ton regard d'enfant sur les paysages que tu traverses, du regard bienveillant de celui qui te sourit au travers de la vitre de ton bus pour que tout soit simple. D'Alexandrie à Suez, et encore plus ensuite dans le Sinaï, l'assistance policière (2 voitures, 2 motards, un policier armé embarqué dans le bus, deux bus de quarante places pour répartir vingt quatre voyageurs), te rappelle que tu n'es pas libre, que les autres, en face de l'autre coté de la vitre, ne sont pas plus libres non plus. Il y a une réalité « oppressive », et nous sommes protégés. Nous ne connaitrons donc de cette région que la « reconstruction » touristique. Les Dix Commandements, la mer Rouge, la Bible, c'est ici !
Donc, il n'y a pas de tourisme « laïc » et « républicain » possible ...
A l'abri dans ton bus climatisé, tu vois bien la dureté du travail des champs, les gigantesques travaux d'irrigation, les villages où se mêlent précarité et modernité. Quelle différence, entre ces villes authentiques, que nous traversons, sans poser le pied sur le sol de terre séchée et ravinée que le vent éparpille en poussière et ces villes de béton désertes, abandonnées avant d'être habitées, qui bordent la mer Rouge, où vingt touristes pendant une heure s'agiteront comme des fantômes frigorifiés, dans le vent et le crachin.
Dans mes deux prochains sujets je te montrerai les photos de deux sites religieux : monastère orthodoxe Firan et Ste Catherine. Je ne les vois guerre que comme des vitrines touristiques, des musées de traditions disparues...
Dans le bus plus personne n'écoute la conférencière. Chaque ralentissement est l'occasion d'agiter la main, de sourire, de faire des signes. Contraste entre toutes ces femmes ces hommes qui travaillent et nous qui découvrons. Et tous ces enfants !
De l'économie de l'Egypte, on nous aura parlé du pétrole et du tourisme. L'agriculture, et notamment le coton dont nous croiserons des dépôts immenses, l'économie de subsistance, nous ne saurons rien. Rassures toi, la conquête, le creusement du canal, nous savons tout ; tout ce qui nous sépare de ceux qui nous sourient.
Il y a des images, des pays que ton imaginaire a décoré de couleurs reçues de ta scolarité. Il n'y avait pas de télé quand t'étais gosse, et l'envie, le besoin de voir, te rendre compte, d'un coup te confrontent à cette réalité d'un monde complexe, où on peut sourire de chaque coté de la vitre qui isole autant quelle protège. Sans pouvoir se rencontrer .
La rencontre est une autre quête ?
Simplement un rêve infantile, puisque c'est là où tu résous l'impossible !